Dans les hauteurs du Dolpo, où les températures peuvent descendre jusqu’à -13°C, 100 familles vont bientôt pouvoir cultiver des légumes frais toute l’année. Le projet de construction de serres transforme une contrainte climatique majeure en opportunité, permettant aux habitants de cette région isolée de doubler leurs saisons de culture et d’améliorer durablement leur sécurité alimentaire.
Quand le climat devient un allié
Au Dolpo, l’agriculture représente l’activité principale pour 92,9% de la population. Les familles cultivent traditionnellement maïs, blé, millet, sarrasin, orge et pommes de terre, mais le climat de haute montagne limite drastiquement les possibilités de culture. Une serre change complètement la donne : elle permet de passer d’une à deux saisons de culture par an, de mars à juillet puis d’août à décembre.
Cette extension de quatre mois supplémentaires révolutionne l’alimentation des familles. Là où elles ne pouvaient cultiver que des céréales de base, elles peuvent désormais faire pousser pommes de terre, choux, choux-fleurs, piments, tomates, concombres, haricots verts, potirons, courgettes, laitues, carottes, radis, oignons jeunes, et même du Marpha mayo, une variété d’épinard asiatique particulièrement nutritive.
Une réponse concrète à la vulnérabilité alimentaire
La réalité du Dolpo est préoccupante : près de la moitié des familles n’ont des réserves d’argent ou de vivres que pour trois mois maximum. Cette vulnérabilité aiguë pousse de nombreuses familles à délaisser l’agriculture pour se tourner vers d’autres sources de revenus comme la récolte du yarshagumba, ce champignon vendu très cher aux Chinois, ou le tourisme.
Chaque serre permettra à une famille de 5 à 10 personnes de couvrir ses besoins en légumes tout au long de l’année. Dans une région où le repas traditionnel népalais se compose de riz accompagné d’un curry de légumes et de lentilles, et où la viande est très rare, ces légumes frais représentent un élément essentiel de l’alimentation quotidienne.
Cent serres, quatre municipalités
Le projet global prévoit la construction de 100 serres réparties dans quatre municipalités du Dolpo : 65 à Shey Phoksundo, 13 à Jagadulla, 12 à Tripurasundhary et 10 à Thulibheri. Chaque serre est conçue pour résister aux conditions climatiques extrêmes de cette région située entre 2 150 et 2 480 mètres d’altitude.
La construction fait appel aux matériaux locaux autant que possible : pierres, terre et cailloux disponibles sur place, piquets et planches en bois accessibles à une journée de marche, portes et fenêtres fabriquées localement. Seuls le triple plastique de serre, les système d’irrigation et les semences doivent être acheminés depuis l’extérieur, un défi logistique considérable dans cette région où le transport peut prendre deux à trois mois.
Une construction collaborative
Chaque serre mobilise la communauté locale. Deux personnes qualifiées sont recrutées sur place pour diriger la construction, qui demande six jours de travail. La famille bénéficiaire participe activement avec trois personnes supplémentaires, créant un véritable élan collectif autour de chaque projet.
La serre elle-même reflète l’ingéniosité locale : construite en pierre, bois, terre et cailloux, avec des portes, fenêtres et ventilations en bois, elle est recouverte d’un triple plastique spécialement conçu pour résister aux conditions himalayennes. Le système d’irrigation, installé en une journée, achemine l’eau directement depuis les sources de montagne disponibles dans chaque village.
Un cercle vertueux économique
L’impact dépasse largement la simple autoconsommation. Après avoir nourri leur famille, les habitants peuvent vendre leur surplus sur le marché local. Les prix pratiqués au Dolpo témoignent de la valeur de ces légumes : 3,80 € le kilo pour les pommes de terre, quand le riz coûte 1,50 € et l’huile 3,80 €.
Cet argent permet ensuite d’acheter des denrées de première nécessité non disponibles localement : riz, lentilles, huile, sel, farine. Les bénéficiaires indirects incluent les communautés locales, les hôtels, les touristes et toute personne de passage susceptible d’acheter des légumes frais dans cette région où ils sont rares.
Un accompagnement expert
Le projet bénéficie de l’expertise d’Ang Bahadur Lama, titulaire d’un Master en sociologie et impliqué depuis 2008 dans le développement du Dolpo. Il a travaillé six années pour le projet HIMALI de la Chambre de commerce népalaise, soutenant les communautés locales dans l’obtention de subventions et la formation. Son expérience avec des organisations comme USAID, Agro Enterprise Center et Winrock garantit un suivi professionnel du projet.
Le partenariat avec le Centre Communautaire de Conservation et de Développement (CCDC Dolpo), affilié au Conseil de la protection sociale du ministère des affaires sociales népalaises, assure une coordination optimale avec les autorités locales.
Un investissement dans l’avenir
Chaque serre représente un investissement de 793,98 € qui transforme durablement la vie d’une famille. Les premières semences sont financées par le projet, puis les graines des premiers légumes sont conservées pour les saisons suivantes, créant un cycle autonome.
Ce projet s’inscrit parfaitement dans la philosophie de SolHimal : respecter les traditions locales tout en apportant des solutions concrètes aux défis quotidiens. Dans un écosystème fragile et particulièrement sensible aux changements climatiques, ces serres offrent une résilience nouvelle aux familles du Dolpo, leur permettant de maintenir leur mode de vie agricole tout en améliorant significativement leur sécurité alimentaire.
L’autonomisation des populations locales passe par ces gestes simples mais révolutionnaires : donner aux familles les moyens de cultiver leurs propres légumes, même quand la montagne semble hostile à toute forme d’agriculture.

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